Premier rendez-vous lecture de l’année, et certainement pas le dernier car je continue à lire beaucoup et j’ai envie de partager mes découvertes avec vous. Si on en m’avait pas offert ce roman, je ne l’aurais pas lu. Un livre qui parle du fait d’assumer ses cheveux blancs ? 250 pages sur ce sujet ? Cela me paraissait tellement futile… Mais j’ai eu la curiosité de lire l’incipit, et je ne le regrette pas.
Cette lecture m’a permis de me changer les idées en une période d’anxiété, et l’aspect superficiel disparait bien vite au profit d’un questionnement sur l’âge d’une femme. Il s’agit bien plus d’assumer son âge – et les marques de vieillissement qui vont avec – qu’une simple couleur de cheveux.
Je sais qu’elle a libéré beaucoup de femmes qui avaient envie de se lancer, et je trouve que la couleur blanche lui va mieux que sa couleur antérieure, mais je pense que je ne ferais pas ce choix.
Le plus difficile dans sa métamorphose était la période de transition, où elle a des racines blanches et le reste noir. Sophie Fontanel a fait le choix d’assumer cette période et le côté Cruela que ça lui donnait. D’ailleurs je l’ai croisée lors d’une présentation presse, j’avais remarqué son aura (et son tempérament affirmé) et j’avais un peu bloqué sur ses cheveux car je trouvais que ça donnait un air négligé qu’elle n’avait pas du tout d’un point de vue vestimentaire ! Mais cette phase a fait partie de sa mue et elle l’explique très bien.
Incipit
L’histoire, tu la connais.
C’est une image sur laquelle tu tombes un jour, une photo de toi prise dix ans auparavant. Au milieu des lauriers fleurs de ce temps-là, du fond du lointain, tu as quinze ans et tu souris.
Si tu t’en souviens, tu n’avais pourtant pas trop de raisons de te réjouir, à l’époque, alors qu’une cousine dirigeait sur toi ce miroir supplémentaire qu’est l’objectif. Qu’est-ce que ça allait encore donner ?
Si tu t’en souviens, tu te sentais mal à l’aise, incertaine et floue et confuse, à peine là, au point de mettre en question ta légitimité et ton avenir, pile au moment où quelqu’un s’évertuait à immortaliser un instant de toi. Tu avais un peu honte, vraiment tu étais désolée pour la personne qui prenait la photo, tu aurais voulu la prévenir qu’elle gaspillait de la pellicule pour pas grand-chose si c’était pour toi.
Voilà pourquoi tu t’étais écriée :
« Arrête ! Je suis monstrueuse en photo ! »
Tu avais tenté une grimace de dégoût, en anticipation, ta main devant ton visage, comme Greta Garbo qui avait ce geste, quand les paparazzi ou les passants, à NewYork, autour de la 52e Rue, tâchaient de lui voler une image. C’était Greta Garbo, elle disposait d’un mouchoir pour cacher davantage, au cas où sa main n’aurait pas suffi. Il est insensé de penser que Greta Garbo et toi ayez pu avoir des points communs. Et pourtant.
Au bout du compte, tu t’étais laissé photographier, sermonnée par quelqu’un qui te reprochait de faire ta vedette.
Puis vient le moment que nous avons presque tous connu, ce moment où nous réalisons que nous n’étions pas si horrible. Sophie Fontanel en fait le constat, ne comprend pas pourquoi elle se dépréciait tant, et tente de retrouver une image apaisée d’elle-même.
Et l’apparition en question ? De quoi s’agit-il ? Cela se passe en juin 2015, à 18 heures, sur le port de Saint Tropez. Sophie, attablée seule et en pleine période de doute, voit descendre une femme d’un yacht. Une femme qui capte tous les regards :
Svelte, dorée à peine par le soleil, elle était jeune encore. Je précise « encore », car une chevelure longue et blanche lui flottait sur les épaules, avant de partir voleter derrière elle comme les ailes d’un ange. (…) Les regards convergeaient sur elle, elle était vraiment une apparition.
Sophie Fontanel ose l’aborder et lui demander ce qui l’a aidée à ne plus cacher ses cheveux blancs. La femme, mystérieuse et un peu agacée, lui répond que c’est la curiosité.
Et l’impulsion est donnée !