Librairie : Céleste Albaret, Monsieur Proust

Me voici au rendez-vous librairie, même si ces quinze derniers jours je n’ai eu le courage de n’ouvrir que quelques magazines. Voici le dernier livre que j’ai lu, mais pas fini, je vais vous en expliquer les raisons.

Cet ouvrage n’est pas un roman, il s’agit du témoignage de Céleste Arbelet, la gouvernante de Marcel Proust, qui a passé à ses côté les huit dernières années de la vie de l’écrivain – et les huit années où il écrivit son chef d’oeuvre.

Elle incarnait presque la seule présence auprès de lui, qui vivait désormais reclus dans son appartement du boulevard Haussmann, en proie à ses douleurs et à son asthme. Elle a longuement refusé de livrer ses souvenirs, et l’a finalement fait à l’âge de 82 ans car elle a jugé que d’autres, moins scrupuleux, avaient trop trahi sa mémoire. Ses propos ont été recueillis au cours de 70 heures d’entretien avec Georges Belmont qui a été frappé par sa franchise.

Ce témoignage nous permet de voir Proust totalement différent – le « vrai Proust » selon Georges Belmont – sous l’angle du quotidien, des menus détails et des habitudes bien ancrée qui rythmaient ses journées, ou plutôt ses nuits car il se réveillait vers 16 heures.

Voici l’incipit :

Chapitre I

Je vois entrer un grand seigneur

Il y a maintenant soixante ans que je l’ai vu pour la première fois, et pourtant c’est comme si c’était hier. Souvent il me disait : « Quand je serai mort, vous penserez toujours au petit Marcel, car vous n’en trouverez jamais d’autre comme lui. » Et aujourd’hui je vois bien qu’il avait raison, comme toujours d’ailleurs. Je ne l’ai jamais quitté, je n’ai jamais cessé de penser à lui ni de le prendre pour exemple. Les nuits où je ne dors pas, c’est comme s’il me parlait. S’il survient quelque chose qui me pose un problème, alors je me demande : « S’il était là, qu’est-ce qu’il me conseillerait ? » Et j’entends sa voix : « Chère Céleste… » et je sais ce qu’il dirait. Toutes les choses heureuses qui m’arrivent, je me dis que c’est lui qui me les envoie, parce qu’il ne me voulait que du bien. Chaque fois qu’il m’est arrivé quelque chose d’heureux de son vivant, ou qu’on lui faisait un compliment de moi, il était si content. Quand on a été puissant comme lui sur la terre, il est impossible qu’on ne le demeure pas après, et je suis sûre que, même au delà, il est avec moi.

Céleste n’est pas arrivée par hasard au service de Marcel Proust. Son mari, Odilon, était un chauffeur ponctuel de l’écrivain, et c’est ainsi que Proust lui a demandé si Céleste pouvait devenir sa gouvernante. Odilon est sous le charme de l’écrivain, et il déclare d’ailleurs à sa femme, au moment où elle va faire sa connaissance :

Tu verras, M. Proust est un homme très gentil. Il faut bien faire attention à ne pas lui déplaire, parce qu’il observe tout. Mais jamais tu ne rencontreras quelqu’un d’aussi charmant.

Ce témoignage nous présente Proust dans son quotidien et nous le rend particulièrement vivant, incarné, dans con carcan de souffrance. Céleste le rencontre d’ailleurs pour la première fois au coeur d’un nuage de fumée car il faisait des fumigations très intenses pour lutter contre son asthme. Elle l’accompagne dans sa dernière expédition à Cabourg. Il a failli mourir étouffé par une crise d’asthme lors du trajet retour et a alors décidé de ne plus se déplacer. Il vit alors reclus dans sa maladie et écrit avec frénésie. Il mange très peu et son café doit être préparé selon un rituel très spécifique. Son élégance légendaire et son souci d’être impeccable ne le quittent jamais, même s’il ne sort plus de sa chambre. Il nous apparaît avec ses dents parfaites et très blanches, sa moustache soignée, ses vêtements bien coupés.

J’ai au début été enchantée par la lecture de cette profusion de détails, mais cela m’a ensuite fatiguée. Je pense qu’il aurait fallu ôter certains passages pour que la lecture soit plus légère. Je ne l’ai pas fini car j’ai accouché alors que j’en étais à la moitié, mais je compte reprendre la lecture, en diagonale si nécessaire, car j’arrive à des chapitres prometteurs :

Il me racontait ses soirées

Son amour pour sa mère

Ses premières amours

J’aime lire les romans à l’éclairage d’éléments bibliographique. Cet ouvrage aura eu le mérite de me donner envie de me lancer – sérieusement cette fois-ci – dans La recherche du temps perdu. Je n’ai lu que le premier tome, sans réel plaisir, davantage pour « l’avoir lu ». Mais je sens que je suis prête à me plonger pleinement dans son univers, et à l’apprécier. Je me souviens de mon professeur de littérature en Hypokhâgne, fervent admirateur de Proust, qui s’est gardé le dernier tome de la Recherche pour « ses vieux jours » tant il voulait savourer cette lecture.

Et vous, avez-vous déjà lu un roman de Marcel Proust ?

Voir aussi:

Le vendredi c'est librairie : Tempête de J.M.G. Le ClézioLibrairie : Charlotte de David FoenkinosLibrairie : Jean-Philippe BLONDEL, Le baby-sitter

L’article Librairie : Céleste Albaret, Monsieur Proust est apparu en premier sur Une parenthèse mode.


wallpaper-1019588
Chaussures de voyage : le parfait compromis entre confort et style
wallpaper-1019588
Chaussures de voyage : le parfait compromis entre confort et style