Librairie : Entre ciel et Lou, Lorraine Fouchet

J’avais envie de vous parler immédiatement de ce roman que j’ai fini hier soir et que j’ai lu en une semaine car j’ai essayé de faire durer cette lecture au maximum tant j’avais plaisir à savoir que cette histoire m’attendait le soir. Il s’agit de Entre ciel et Lou, de Lorraine Fouchet, publié aux éditions Héloïse d’Ormesson.entre-ciel-et-lou

Je ne connaissais pas l’auteur, Lorraine Fouchet, mais son parcours mérite d’être décrit : née en 1956, elle a été pendant quinze ans urgentiste au Samu et à SOS Médecins, avant de se consacrer à l’écriture. Cette connaissance médicale est importante car elle est présente tout au long du roman, notamment au niveau de la cardiologie. J’ai par exemple appris les termes « diastole » et « systole » car « Systole » est le surnom secret que le fils, Cyrian, donne à son père Jo. Cela désigne la phase de contraction du coeur et en dit long sur les relations filiales.

Ce roman fonctionne sous forme de journal intime à plusieurs voix. Les personnages alternent leurs récits et même Lou, l’absente, écrit de « là où l’on va après ». Tout commence par l’enterrement de Lou, la femme de Jo qu’il a aimée éperdument pendant des dizaines d’années.

Attention, voici un incipit très touchant :

31 octobre

Jo, île de Groix

Je m’appelle Joseph, tu m’appelais Jo. C’est moi au premier rang dans l’église, avec les yeux rougis, le caban et le pull turquoise posé sur les épaules. Tu disais que les lys avaient un parfum à réveiller les morts, j’aurais dû t’en acheter. Tu avais le sens de l’amour mais un sens de l’humour pire que le mien. Notre vie, tu l’as passée à me faire des blagues nulles. Je n’arrive pas à admettre qu’une femme lumineuse comme toi s’est éteinte. Il y a forcément un piège. Je vais tomber dedans quand ?

Nos enfants sont arrivés par le bateau. Cyrian a roulé depuis Paris avec sa femme Albane, leur fille Charlotte et le chiot Hopla, dans sa Porsche Cayenne noire qu’il a laissée au parking de Lorient. Sarah a pris le train en s’aidant de sa canne sans s’encombrer de son fauteuil roulant. Cyrian a tout géré comme il gère son entreprise. Il a choisi ton cercueil, s’est chargé de l’annonce dans les journaux et du livret de messe avec ta photo suffocante de beauté. Notre fils n’est ni sympathique, ni drôle, ni attendrissant, mais il est irréprochable.

Les bancs de l’église sont tous occupés : les Groisilons d’un côté, les non-insulaires de l’autre, ta famille devant. On a marié ici les enfants de nos copains, on a enterré leurs parents. On s’asseyait à l’arrière de l’église en se tenant la main. Ce matin, tes doigts me manquent et je suis assis au premier rang comme un fayot.

Cette entrée en matière au coeur de l’enterrement de celle qui manque à tous, et dont l’absence les oblige à revoir l’équilibre instable de leur vie, m’a beaucoup touchée. Il n’y a rien de mièvre ou de voyeuriste dans ces mots. Les propos du père envers son fils sont durs et on apprend au fur et à mesure que Cyrian ressemble beaucoup à son père Jo, c’est peut-être ce qui le gêne autant inconsciemment.

Jo, le cardiologue récemment retraité, comptait mener une existence heureuse auprès de sa femme tant aimée, dans l’île de Groix où ils rêvaient de passer des jours heureux, après des années parisiennes. Mais Lou lui a fait faux-bond, à 56 ans.

Le notaire transmet à Jo une lettre que Lou lui avait destinée. Elle lui demande une dernière faveur : qu’il fasse en sorte que leurs deux enfants, Cyrian et Sarah, soient heureux.

Sarah avait tout pour elle : très belle, sportive, enthousiaste, elle venait de réussir le concours de Polytechnique, et allait épouser Patrice. Mais des symptômes inquiétants sont venus perturber cette promesse de vie et le verdict est tombé : elle est atteinte d’une maladie dégénérative qui l’oblige à se déplacer avec une canne – dans le meilleur des cas – ou dans un fauteuil roulant. Patrice, effrayé à l’idée de ne pas avoir d’enfants avec elle – et plus certainement effrayé par son handicap – la quitte. Tout s’effondre. Elle collectionne désormais les aventures avec des hommes qu’elle ne veut pas voir plus de deux fois. Cependant elle est devenue actrice et le succès est au rendez-vous, mais pas le bonheur.

Son frère Cyrian, jugé si sévèrement par son père Jo, n’est pas heureux non plus. Tout semble lui réussir, mais ce ne sont que des apparences, à l’image de sa Porsche Cayenne. Il vit dans une belle maison au Vésinet avec sa femme Albane à qui il n’accorde plus d’attention et sa fille Charlotte qu’il voit peu. Il a une superbe maîtresse, Dany, qui le divertit mais ne lui apporte pas plus de bonheur. Cyrian est le père d’une autre fille, Pomme, née de son union avec Maëlle, une habitante de l’île de Groix qu’il a follement aimée mais qui n’a pas voulu le suivre à Paris, trop ancrée dans son île. Pomme, à qui son père rend visite à peine quatre fois par an, est un exemple de courage, de joie de vivre et de générosité. Elle jouera un rôle majeur dans la nouvelle tournure que prendront leur vie.

Mon avis

Ce roman est une véritable réussite à mes yeux : les personnages s’incarnent et restent dans notre esprit. Ils sont attachants et touchants parce qu’ils sont imparfaits, donc totalement humains. Des accidents surviennent, des secrets se dévoilent, des sentiments se déclarent et l’alchimie se réalise.

Je n’ai qu’une envie : le conseiller à tout le monde ! Je remercie Héloïse pour ce choix éclairé.

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